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Réussir la gestion des datas ou les politiques RSE en Asie

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L’Union des marques propose des Masterclass, un format mixant conférence et échanges avec une personnalité inspirante et reconnue pour son savoir-faire dans son domaine d’intervention. Pour cette Masterclass du 9 mars, Laure De Carayon nous fait l’honneur d’être notre keynote speaker pour partager son expérience.

Quels sont les 5 facteurs clés de succès pour l’implantation d’une entreprise européenne sur le marché asiatique ? 

Après 10 ans de décryptage de l’écosystème digital chinois, l’adaptation/le respect de la culture, je peux nommer l’établissement d’une équipe de direction sur place, la localisation du marketing, le choix de partenaires locaux, l’approche test&learn et l’activation mobile first/only parmi les facteurs clés d’une implantation réussie.

Ceci dans un contexte singulier et sans équivalent : une forte croissance (passant toutefois de 10% en 2010 à 6% en 2019, 2,3% en 2020, puis 8,1% en 2021), fortement liée à la modernisation et la digitalisation rapide du pays, « programmées » / inscrites dans les Plans quinquennaux du Parti, et « propulsées », toujours avec l’aval du Parti, par l’émergence des premiers géants digitaux : Baidu, Alibaba, Tencent. Une trajectoire qui a vu naître au pays de l’enfant unique, une classe moyenne comptant 350 à 400M de personnes en 2021 (qui pourrait atteindre 800M d’ici 2035), fortement influencée par les marques occidentales.

 Si ces facteurs de succès demeurent valides aujourd’hui, c’est avec les relations personnelles que se fera la différence.

 

De plus :

- L’Asie n’est pas la Chine. Ainsi, ces facteurs varient ils selon le rythme de développement économique (dont la digitalisation) et les spécificités de chaque pays (ouverture ou protectionnisme, régulations…),

- Cette nouvelle décennie entérine un changement de paradigme, avec le nouveau rapport de force Est-Ouest qui se traduit par un nationalisme croissant et beaucoup plus de marques de qualité (surtout en Chine qui se positionne comme concurrent sérieux des marques occidentales). La Corée, un véritable « cultural shaper », l’Inde, un (déjà) géant économique grâce à la dynamique unique de son retail offline (1ère édition de Asia Loopers India en Juillet 2021) et l’accélération simultanée de sa digitalisation, et le Sud-Est asiatique présentent une mosaïque d’opportunités.

Le sens (purpose), l’origine, l’exclusivité, la supériorité des produits/services, les politiques ESG (Environnementales, Sociales et de Gouvernance), le storytelling, les activations off/online, seront des préalables toujours plus déterminants pour envisager une implantation réussie.

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Quelle place les sujets de data et de transparence occupent-ils dans les principaux écosystèmes digitaux asiatiques ?

Ces sujets sont à l’agenda des instances de régulations mais leur exécution en Asie est très inégale, notamment en raison de la fracture numérique. 

La Chine fixe ses propres règles : en s’inspirant du RGPD (Règlement général sur la protection des données), le Cyberspace administration of China (CAC) est en charge des nouvelles règles sous le nom de PIPL (Personal information protection law). Effective depuis novembre 2021, la loi se concentre sur le consentement des utilisateurs d’applications mobiles (1,030 milliard de mobinautes). Une loi qui arrive dans un contexte de forte pression, dans le cadre de la campagne dite de « Prospérité commune » portée par Xi Jinping. L’incertitude, les coûts croissants de mise aux normes quant au processing et au stockage des données (impossible hors de Chine pour les données personnelles des Chinois), et les risques (de fortes amendes jusqu’à 5% du revenu annuel, jusqu’au blacklisting), fragilisent les entreprises étrangères (mais aussi chinoises), voire les incitent à quitter le pays. Le plus grand impact de cette loi et sa tournure politique protectionniste pourraient être son

influence sur d’autres pays en train d’élaborer ou de réviser leurs propres lois, consistant à intégrer ces mesures de localisation des données. Il semble que l’Inde et le Vietnam, par exemple, soient en train d’adopter de telles mesures dans leur projet.

En Inde, la Personal data protection bill (PDP, the « Bill ») devrait passer devant le Parlement ce mois-ci, et entrer en vigueur au 1er semestre 2022. Il va au-delà du RGPD.

Au Japon, la loi modifiée - l’Act on protection of personal information (APPI) - votée en Juin 2020, entrera en vigueur le 1er Avril 2022.

En Corée, le Personal information protection act (PIPA) a été promulgué en 2011. Il est l’un des régimes de confidentialité les plus stricts au monde, s’appliquant même aux entités gouvernementales. Des lois spécifiques à des secteurs existent, comme celle applicable aux fournisseurs de solutions IT.

Le risque pour les entreprises est donc d’avoir à naviguer au sein d’un ensemble complexe, très fragmenté. Ainsi l’APEC (Asia Pacific economic cooperation) Privacy Framework est un ensemble de guidelines qui établissent des protections efficaces et assurent la poursuite de la croissance commerciale dans la région APEC qui réunit 27 pays. Ce cadre de confidentialité de l’APEC a lancé le Cross border privacy rules (CBPR). Celui-ci, contrairement au RGPD, ne remplace ni ne modifie les lois et réglementations nationales d'un pays. Et lorsqu'il n'y a pas d'exigences nationales applicables en matière de protection de la vie privée dans un pays, le système CBPR est destiné à fournir un niveau minimum de protection.

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Les opportunités de business avec l’Asie digitale peuvent-elles s’inscrire dans une stratégie RSE d’entreprises européennes ?

 En 2013, l'Inde est devenue le premier pays à imposer la responsabilité sociale des entreprises avec le Companies Act de 2013. Elle a introduit en mai 2021 de nouvelles exigences de reporting ESG pour les 1000 premières sociétés cotées du pays. Les sociétés tech de 1er plan telles Infosys, Wipro ou Tech Mahindra font partie du Dow Jones sustainability index (DJSI). ESG est une priorité pour les blue chips stocks tels Tata Consultancy Services (TCS) ou Reliance Industries. Le leader du e-commerce, Flipkart, s’est engagé à la suppression totale des sacs plastiques à usage unique, et à une transition à 100% de véhicules électriques dans son réseau de villes logistiques d’ici 2030. Le Securities and exchange board of India (SEBI), le régulateur du marché, stipule que leur divulgation doit être faite via le Business responsibility and sustainability report (BRSR), en ligne avec les standards de reporting globaux. Ces rapports, facultatifs pour l'exercice fiscal 2021-22, seront obligatoires à partir de l'exercice 2022-23.

 

Lors du dernier MMA Indonesia Forum en octobre 2021, des représentants de Nestlé et Exxon Mobil Indonésie ainsi que Godrej Indonesia (entretien ménager/hygiène personnelle) ont partagé leur engagement pour le développement de stratégies plus responsables et durables. La bourse indonésienne a montré son engagement envers les principes ESG en lançant 2 nouveaux indices basés sur les scores ESG. L’Indonésie concentrera sa présidence du G20 2022 (Sommet à Bali en Oct-Nov) sur 3 piliers principaux : une architecture mondiale de la santé, une transition énergétique durable et la transformation digitale.

 

La Chine s’est engagée mi-2020 à la neutralité carbone d’ici 2060. Si les challenges sont immenses, la feuille de route est bien engagée. Sur le sujet sensible, par exemple, des emballages et paquets sur le 1er marché mondial du e-commerce, où l’on compte plus de 50% de retours lors du 11.11/Singles’Day, les leaders JD.com et Alibaba ont lancé des initiatives lors de la dernière édition, telles l’établissement de boites consignées, de services de recyclage, le gain de « points énergies » virtuels sur l’application Alipay Ant Forest qui se transforment en plantation de vrais arbres dans les régions arides, etc. Autour de ce sujet, nous avions organisé un webinar China Connect en Novembre 2021 avec Nathalie Bastianelli (ex-Head de Havas Shanghai et Beijing), auteur de « Quand la Chine s’éveille verte ».

 

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